En toute discrétion
Oubliez la mythique appellation « 63 » de la routière allemande, qui ne renvoyait d’ailleurs plus à la cylindrée titanesque de son V8 depuis un bout de temps. Désormais, la plus méchante des Classe E portera le chiffre 53, et l’appellation Hybrid. Et si la puissance cumulée est identique à la génération sortante avec une pointe à 612 ch (585 ch sans le « Race Start »), elle l’obtient d’une manière différente. Exit le V8 5.5, le downsizing continuant de faire des ravages. Sans aller dans l’excès comme la petite sœur Classe C qui ne respire que grâce à des quatre-cylindres, la E officie avec un « six en ligne ». C’est mieux, mais il ne s’agit pas d’un pure moteur AMG. Un « simple » CLE 450 en est par exemple doté. C’est grave docteur ? L’excellente santé de ce 3.0 biturbo de 449 ch permet à cette Classe E en tenue de sport de ne pas traîner en route. Surtout que le moteur électrique de 163 ch apporte un couple immédiat qui lisse les démarrages et les passages de rapport. De la belle ingénierie, parfaitement coordonnée, et dont le tempo cadencé par la transmission automatique à 9 rapports s’accommode bien d’une conduite sportive. En résumé, elle sait toujours aller vite, mais cette fois avec plus de distinction.
Petit moteur, mais grosse batterie
Est-ce vraiment ce que l’on demande à une Classe E AMG ? Aussi 53 soit-elle ? De l’aveu même des ingénieurs, tout a été fait pour rendre la routière de Stuttgart plus discrète, plus silencieuse, plus « Classe S » dans l’esprit. Effectivement, l’air de famille est toujours aussi frappant, tout comme l’attitude. Aussi performante soit-elle, la E53 conserve un confort remarquable grâce à une suspension pneumatique conciliante mais rigoureuse lorsqu’il le faut. L’intérieur n’oublie pas les codes de la sportivité, mais plonge dans un écrin de cuir et d’écrans taille XXL. Seule fantaisie, l’AMG Sound System, qui offre une sonorité « sportive » à la propulsion 100 % électrique, et amplifie le ronron du bloc thermique via les haut-parleurs. L’un comme l’autre sonnent artificiel et ne rendent en rien hommage à l’ancien V8. Enfin, contrairement aux récentes productions hybrides du département AMG, l’hybridation ne sert plus ici que la performance. La E53 embarque un gros accumulateur de 21,2 kWh et revendique une autonomie 100% électrique supérieure à 100 km. Une endurance que nous arrivons effectivement à tester en conditions réelles, mais qui impose le poids de cette grosse pile. Avec 2390 kg affiché sur la balance, voilà qui entérine définitivement la personnalité flamboyante de la plus performante des Classe E.
Un modèle à bannir ? Il est vrai que la tonitruante Audi RS6 conserve le charme indéniable de son V8 non hybridé et une ligne à couper le souffle. Il est aussi vrai que la toute nouvelle BMW M5, certes électrifiée elle aussi et tout aussi lourde, conserve en revanche un V8. Plus chère, même si les finances sont rarement un argument décisif dans cette catégorie, la E53 Hybrid commence à être à court d’arguments. Pourtant, l’Allemande démontre une réelle maitrise sur la route. D’abord, la multiplication des modes et des configurations possibles (parfois anecdotiques), donnent une sensation plaisante d’une voiture « à la carte ». C’est plus ou moins sensible selon les modes et les situations, mais cela a le mérite d’exister, et offre surtout une double personnalité à cette Mercedes-AMG E53.
Sur les routes secondaires, son gabarit n’est pas idéal. Mais la E53 est diablement rapide, et lance un uppercut à la moindre réaccélération. L’hybridation a toujours du bon. S’il faudra passer sur la bande son et les montées en régime grisantes, le chrono tranche toujours. L’isolation de l’extérieur gomme les sensations, tout comme la direction, qui gagne en consistance, mais jamais en feeling. Quant à la pédale de frein, voulue ferme comme une voiture de course, elle n’offre rien de très naturel dans le touché. Tout cela n’est qu’une histoire de sensation, car pour le reste, l’Allemande bluffe son monde. Agile, virevoltante sur les enchaînements de virages grâce à ses roues arrière directrices et dotée d’une stabilité hors-pair, elle dévoile une exécution proche du sans faute entre dynamisme et confort. Sa transmission intégrale assure son labeur et sait répartir le couple en fonction des besoins, et parfois des envies. Et la déclinaison break, encore plus élégante et réellement pratique, apporte une touche particulièrement séduisante pour qui en a les – gros – moyens.