Essai PORSCHE Taycan Turbo S

Réplique de Porsche à Tesla, la Taycan s’adresse surtout aux fans de 911 cherchant une auto un tant soit peu familiale. Car cette électrique se targue de performances et d’un dynamisme dignes de la glorieuse berlinette. Mais tient-elle ses promesses ?

Bombe ionique

A tous les niveaux de gamme, les voitures électriques se multiplient. Tesla a initié le mouvement avec sa Model S aux accélérations d’hypercar, ce qui ne pouvait laisser Porsche insensible. L’allemand est aussi, comme tous les fabricants de voitures thermiques, dans l’obligation légale de réduire drastiquement les émissions de CO2 moyennes de sa gamme. Pour ce faire, outre des hybrides, une auto 100 % électrique s’imposait, qui a été annoncée en 2015 par le concept Mission E. De celui-ci découle directement la Taycan, présentée quatre ans plus tard et qui en respecte remarquablement l’esthétique. Elle se révèle fluide, simple et élégante, tout en respectant les codes visuels de la 911. Ainsi des ailes avant se détachant du capot, du pavillon fuyant et du vitrage latéral se terminant en ovale. Ceci n’a pas lieu au détriment de l’aérodynamique, puisque le Cx ressort à un exceptionnel 0,22 !

Technologie lourde

Les références à la 911 ne sont pas là que pour faire joli, Porsche insistant sur la filiation entre celle-ci et sa berline zéro émission. Celle-ci s’adresse en effet aux adorateurs de la berlinette de Zuffenhausen, ce que confirme la forme du combiné d’instruments, une superbe pièce digitale reproduisant avec beauté les cadrans de la 911. Il s’inscrit dans un habitacle ultramoderne mais dont l’habitabilité ne dépasse pas celle d’une compacte. Les possesseurs de 911 souhaitant s’offrir une quatre places pour leur une petite famille y trouveront leur compte, ceux d’une Tesla Model S souriront. A plus forte raison à l’examen des coffres avant et arrière, avalant respectivement 81 l et 366 l de bagages. Et, pour préserver la rigidité de la caisse, il n’y a pas de hayon. Ne blâmons pas les ingénieurs allemands pour ce packaging apparemment perfectible : ils devaient combiner dans une carrosserie très basse évoquant leur modèle fétiche quatre vraies places et une motorisation électrique performante. De ce point de vue la Taycan Turbo S fait fort. Elle se dote de deux moteurs électriques fabriqués par Porsche, un par essieu (celui de l’arrière se couplant à une boîte à deux vitesses), offrant une puissance totale de 625 ch, voire 761 ch quand le boost s’enclenche. Tout de même ! Pour les alimenter, la batterie lithium-ion présente une capacité brute de 93,4 kWh, ce qui octroie une autonomie de 413 km en norme WLTP. Pas un record, mais leur remplissage de watts est rapide : comme le système encaisse 270 kW en courant continu, on passe de 5 à 80 % de charge en 22,5 min sur une borne Ionity, réseau dont Porsche est partenaire. On branche la prise combo CCS lors d’une pause sandwich-café-pipi sur autoroute, et on gagne 300 km. En théorie.

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Côté châssis, le constructeur indique que l’implantation des batteries dans le plancher permet d’abaisser le centre de gravité de 9 mm face à celui d’une 911, déjà très efficace. La suspension pneumatique s’allie à une double triangulation à l’avant et un essieu multibras à l’arrière (où les roues sont directrices) : du sérieux, tout comme les disques en carbone-céramique monstrueux, 420 mm sur la proue et 410 mm sur la poupe ! Il faut dire qu’ils ont 2 370 kg à stopper… Ce poids colossal n’empêche pas la Taycan de passer les 100 km/h en 2,8 s et les 200 km/h en 9,8 s. Le premier chiffre n’inquiète pas une Tesla P100D, le second si !

Docteur Jeckyll…

Sur route, comment cela se traduit-il ? Déjà, on est choyé dans le cockpit parfaitement fabriqué de la Porsche, même si les écrans tactiles à retour haptique regroupant toutes les commandes demandent une accoutumance. Mais ils sont si beaux ! Contact à gauche du volant, pression sur le petit levier à sa droite, on roule. En silence. Les ailes avant visibles depuis le poste de conduite facilitent le placement de cette auto imposante (près de 5 m de long et 2 m de large) qui évolue tout en douceur en ville, sur route et autoroute. Les bruits d’air et de roulement s’avèrent très bien filtrés, la suspension absorbe aisément les aspérités, et la direction, suffisamment ferme, offre un très bon feeling. Les instruments à plusieurs modes d’affichages se révèlent très lisibles, les aides à la conduite bien calibrées, bref on se déplace dans une immense sérénité. En respectant les limitations de vitesse, la consommation routière moyenne tourne autour de 22,5 kWh/100 km : très acceptable. Cela dit, avec une batterie chargée à 75 % je n’ai pu rallier le nord de Paris depuis Le Mans (217 km), devant m’arrêter sur l’autoroute pour effectuer une recharge. Problème, la station Inonity étant dans la direction opposée, j’ai dû sortir, effectuer plus de 20 km dans l’autre sens pour atteindre l’aire de Chartres puis revenir sur mes pas. Absurde !

Mister Hyde !

Mais si on écrase l’accélérateur… C’est du brutal ! En effectuant une reprise pour doubler un camion, ma tête a heurté le siège intégral. Ça surprend… Ensuite, aucune supercar thermique au monde n’accélère aussi fort à partir de l’arrêt ! Pourquoi ? Parce que la Taycan Turbo S dispose de plus de 1 000 Nm instantanés qui transitent de suite au sol. Sur le circuit Bugatti au Mans, j’ai testé le launch control, disponible sur le mode Sport + (générant un bruit artificiel assez rigolo). Sur les premiers mètres, ma vue s’est brouillée ! En moins de 3 s, j’avais passé les 100 et en 7 s, j’étais à plus de 170 km/h. Ensuite, les freins assurent une décélérant tout aussi violente !

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Sur piste, on peut exploiter un minimum l’auto, qui effectivement, profite d’un équilibre dynamique exceptionnel, doublé d’une adhérence remarquable et d’une motricité totale. Dans les slaloms, elle révèle une agilité étonnante, sous-vire très tard, et sait survirer quand on remet les watts en sortie de virage. En somme, nous avons ici une authentique voiture de sport, ultra-performante et efficace sur circuit (même si je n’ai pas tourné assez longtemps pour juger de l’endurance des freins), capable d’emmener confortablement quatre personnes et n’émettant pas de gaz à l’usage.

À retenir

Les plus

Performances surréalistes, superbe efficacité dynamique, très grand agrément de conduite, douceur, confort, finition, polyvalence, habitacle magnifique, charge rapide.

Les moins

Autonomie réelle décevante, habitabilité juste correcte, coffres moyens, prix très élevé.

Note de la rédaction

16,8/20

Agrément de conduite : 18/20
Sécurité active et passive : 19/20
Confort et vie à bord : 17/20
Budget : 12/20
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