Du souffle, un peu court
L’électrique n’est plus une simple tendance, mais plutôt le véritable salut pour un marché en pleine mutation. Chahuté par des pressions environnementales toujours plus fortes, le secteur automobile est sur le point de connaître une nouvelle ère industrielle, organisant ainsi une marche forcée pour les constructeurs. C’est le cas d’Audi, dont les dernières annonces dessinent un avenir très différent. Le constructeur d’Ingolstadt, au catalogue très fourni, lancera sa dernière voiture thermique en 2026. Sa gamme mutera ensuite pour une offre 100 % électrique d’ici 2033. Une telle révolution se prépare, et la marque aux anneaux s’attèle à la tâche.
D’abord en lançant son tout premier modèle 100 % électrique, l’e-tron Quattro dès 2019, puis une spectaculaire berline sportive en 2021 (e-tron GT). Deux modèles haut de gamme accompagnés désormais par un plus démocratique Q4 E-Tron. Le premier d’entre eux compose désormais toute une gamme et se dote d’une variante plus sexy de SUV coupé (Sportback), et d’une version musclée S. Celle de notre essai cumule ces deux attributs, offrant pour près de 100 000 € hors option, tout le savoir faire Audi. Étirant sa ligne sur 4,90 m de long et près de 2 m de large, l’e-tron S Sportback est un beau bébé venant chasser sur les terres de l’ennemi à abattre : Tesla et son Model X, aux impressionnantes Falcon Doors, et capable d’accélérations dignes d’une supercar.
Une version qui muscle son jeu donc, avec une calandre plus démonstrative, des entrées d’air agrandies, des élargisseurs d’ailes et de généreuses jantes de 22 pouces sur notre modèle d’essai. A bord, on retrouve l’ambiance presque clinique des modèles aux Anneaux et une qualité de finition sans reproche. La console centrale remplacée par deux écrans est finalement assez ergonomique, et les rangements sont nombreux. A l’arrière, l’espace est digne d’une vraie familiale, même si la ligne de toit fuyante de ce Sportback rogne quelques centimètres sur la garde au toit. Côté coffre, les 615 litres démontrent eux aussi de certaines aptitudes pratiques pour ce modèle pourtant exclusif (Audi ne compte en vendre qu’une cinquantaine par an en France).
Assez pour les aspects pratiques, intéressons-nous désormais aux entrailles de la bestiole. Comparé à la version classique, ce « S » se dote d’un troisième moteur électrique. Installé sur l’essieu arrière qui en comporte désormais deux, il porte la puissance totale à 435 ch. Un chiffre qui passe même à 508 ch, une fois le mode Dynamic enclenché. La puissance est délivrée sous forme de boost pendant 8 secondes. Dans les faits, l’instantanéité du couple colossal (973 Nm) et la transmission intégrale assurant une motricité sans faille font office de catapulte. Malgré ses près de 2,7 tonnes, l’e-tron S Sportback est capable de « laisser sur place » bien des sportives, et le tout dans une quiétude presque déroutante.
Véritable sprinteur donc, l’allemand n’est pas, par ailleurs, totalement malhabile dès que la route se met à tourner. Bardé de technologies (suspension pneumatique, amortissement piloté, torque vectoring), le châssis de l’e-tron fait preuve d’une réelle maîtrise. Parfaitement maintenu, il jugule efficacement les mouvements de caisse et assure une efficacité de comportement étonnante pour un engin de presque 2,7 tonnes. Si la direction reste peu généreuse en informations, sa consistance et sa précision mettent en confiance dès qu’il s’agit de hausser le rythme. Il n’y a qu’en réel excès d’optimisme, ou sur le mouillé, que la masse importante vient se rappeler à votre bon souvenir. Fort heureusement, cela arrive de manière progressive, avec un léger décroché du train avant qui vient élargir la trajectoire.
A un rythme plus docile, l’Audi e-tron S Sportback se révèle être un formidable voyageur. Très confortable, il enferme ses occupants dans un cocon douillet et forcément ultra silencieux. Une quiétude à peine perturbée par quelques sautillements des énormes jantes de 22 pouces. Un niveau de confort notamment permis par la suspension pneumatique, capable de surélever l’assiette du véhicule, le dotant ainsi de quelques capacités en tout-terrain. Un voyageur au long cours donc, même s’il faudra surtout se contenter de petits sauts de puce.
Cette Audi électrique n’échappe pas à l’écueil d’une autonomie franchement limitée pour un tel véhicule. En réutilisant à son compte la batterie de 95 kWh de la version classique, elle ne peut afficher, avec son moteur supplémentaire et de telles performances, qu’une endurance plus limitée. Si la fiche technique promet jusqu’à 368 km selon Audi (ce qui est déjà peu), il est difficile d’imaginer en pratique des liaisons de plus de 300 km. Sur autoroute, où la consommation énergétique ne descendra pas sous les 30 kWh/100 km, l’étape ne dépassera pas les 250 km. Pour les longs trajets, il faudra optimiser le tracé pour faire étape sur des bornes de recharge rapide (150 kW, 1h). Au quotidien, les bornes publiques ou une Wallbox privée permettront de recharger entièrement la batterie en plus de 8h…
Pour le reste, nous avons bien affaire à une Audi pur-jus, technologique et très exigeante dès qu’il s’agit de renforcer la dotation de série. En finition S Extended, le tarif démarre à plus de 112 000 €. Pourtant, ce n’est qu’à ce niveau qu’apparaissent l’accès et le démarrage sans clé, la caméra de recul, la connectivité Smartphone ou le toit panoramique en verre. Pour profiter d’un mode de conduite semi autonome, il faudra passer par la case options : 2450 €. Ce SUV un brin futuriste peut également se doter de rétroviseurs par caméra pour 1850 € (c’est beau, mais peu ergonomique…), ou d’une conduite prédictive. En localisation sa position via la navigation GPS et en utilisant ses différentes caméras, l’e-tron S Sportback est capable d’adapter son rythme, ralentir à l’approche d’un rond-point ou d’un virage, enclencher son freinage régénératif automatiquement (Pack Assistance ville à 1250 €)… Une conduite presque futuriste et surprenante, mais on finit par s’y faire. De toute façon, c’est bien cet avenir qui nous attend.