Cédric Morançais
04/10/2022
Si, aujourd’hui, plus de 8 acheteurs de véhicules sur 10 n’optent pas pour l’électrique, c’est que quelques zones d’ombre demeurent autour de ces autos. L’autonomie est sans doute la principale, mais tout ce qui a trait à la recharge demeure également bien mystérieux pour l’automobiliste lambda.
Une progression possiblement contrariée
Il s’agit d’un record : entre le 1er janvier et le 31 août 2022, 12,2 % des véhicules nouvellement immatriculés en France étaient des électriques. Par rapport à la même période de 2021, cela représente une part de marché en hausse de plus de 50 %. De quoi réjouir la classe politique hexagonale et les écologistes qui n’économisent pas leurs efforts pour nous convaincre que la voiture électrique est LA solution. Toutefois, en parallèle, 16,7 % des livraisons concernaient des voitures diesel, 29,4 % des hybrides (dont seulement 7,9 % d’hybrides rechargeables) et 37,7 % des essence. La voiture électrique est donc loin d’être une réalité pour la majeure partie de nos concitoyens. Pour tenter de poursuivre cette progression des ventes, le Gouvernement a décidé de maintenir le barème actuel du bonus écologique, qui devait céder la place, le 1er juillet dernier, à une version moins avantageuse, jusqu’à la fin de l’année. Mieux, l’aide maximale de 6 000 €, jusqu’ici réservée aux autos électriques facturées moins de 45 000 €, l’est désormais jusqu’à 47 000 €. Lorsque l’on interroge les conducteurs qui hésitent à sauter le pas, on s’aperçoit toutefois que l’autonomie, supposée ou réelle, des voitures électriques, reste un frein majeur. D’autant que, dans l’esprit collectif, recharger une voiture électrique est à la fois compliqué, faute de bornes en nombre suffisant, et long. Des griefs justifiés ?
Recharger son véhicule électrique au quotidien
A moins de parcourir plusieurs centaines de kilomètres chaque jour, il existe de nombreuses possibilités pour « faire le plein » de sa voiture électrique durant les périodes où on ne l’utilise pas :
Recharger sa voiture électrique à domicile
Pouvoir recharger son véhicule électrique à la maison est la solution la plus évidente, l’une des moins contraignantes mais, également, l’une des moins coûteuses. Il suffit d’une prise dans son garage ou à proximité de l’endroit où l’on stationne son auto, même si c’est en extérieur. En effet, la quasi-totalité des câbles de recharge supportent les intempéries, tant que celles-ci demeurent « normales ». En cas de tempête ou de chutes de grêle, mieux vaut éviter de laisser ce coûteux dispositif dehors (un câble de recharge coûte de 100 à 500 € suivant les modèles et les marques). En vous branchant sur une prise simple, comme vous le feriez pour n’importe quel appareil électroménager, votre voiture électrique peut récupérer de 100 à 150 km en moyenne en une nuit. Gare toutefois, si votre prise électrique est éloignée de votre point de stationnement : il n’est pas question, pour des questions de sécurité, de rajouter une rallonge entre la prise et le câble de chargement. Certains modèles sont d’ailleurs capables de détecter un tel branchement et ils refusent alors de charger. Au besoin, mieux vaut investir dans un câble plus long. Si votre usage nécessite de récupérer davantage d’autonomie, il vous faudra investir dans l’installation d’une borne de recharge de type wallbox. Ce système permet de multiplier, le plus souvent par deux, l’énergie envoyée à la voiture. Il présente également des sécurités supplémentaires, notamment en cas de coupure de courant ou de surchauffe du cordon de charge. Là encore, certains dispositifs supportent de rester à l’extérieur. Outre leur coût, qui varie entre 600 et 2 000 € avant la déduction des éventuelles aides accordées par l’Etat et/ou les collectivités locales, ces bornes nécessitent un câble spécifique de type 2. Un élément livré de série avec la presque totalité des modèles électriques du marché. S’il est indispensable d’en posséder un, c’est que, en France, la législation interdit que la borne installée à votre domicile soit pourvue d’un câble qui lui soit fixé. L’investissement sera toutefois rentabilisé car un tel câble est nécessaire pour se brancher sur les bornes publiques délivrant jusqu’à 22 kW.
Recharger sa voiture électrique au travail
De plus en plus d’entreprises possèdent, sur leur parking privé, des bornes de recharge qui sont parfois gracieusement mises à disposition des employés. Dans ce cas, c’est tout bénéfice pour ce dernier puisque la recharge sera alors gratuite. Suivant le type de borne, il faudra toutefois se doter du câble de recharge adapté.
Recharger sa voiture électrique sur le parking d’un centre commercial.
Sans doute avides d’attirer une clientèle réputée aisée, les grandes enseignes sont de plus en plus nombreuses à faire installer des bornes de recharge sur leur parking. Généralement, si ces dernières sont de faibles puissances, leur usage est gratuit. Dans ce cas, vous ne récupérerez que quelques kilomètres d’autonomie durant vos courses hebdomadaires. Certaines enseignes, telles que Carrefour, Leroy Merlin ou Lidl, équipent désormais la majeure partie de leurs parkings avec des bornes de recharge dont la puissance maximale est de 22 kW. D’autres n’hésitent pas à proposer des points de recharge délivrant 50kW et plus. Il faudra alors mettre la main à la poche pour s’y connecter car de telles bornes sont généralement aux mains d’opérateurs qui n’ont rien à voir avec le commerce qui les héberge.
Recharger son véhicule électrique lors des longs trajets
C’est ici que les choses se compliquent. Non pas que notre pays manque de bornes électriques – la France compte environ 70 000 bornes publiques et une grande partie d’entre elles se trouvent sur les grands axes -, mais les différences de puissance de charge et les écarts de tarifs sont si impressionnants qu’il est difficile, pour un néophyte, de s’y retrouver.
En ce qui concerne le débit des bornes électriques publiques, celui-ci oscille entre 2,2 kW et 360 kW. Plus concrètement, sur les premières, il faudra compter environ 9 heures pour récupérer 100 km d’autonomie, tandis que les dernières, sous réserve que votre voiture accepte des puissances de charge supérieures à 100 kW, ne réclameront qu’une poignée de minutes. Pour s’y retrouver, il est indispensable de se doter d’outils tels que ChargeMap. Cette application, gratuite, référence les bornes publiques de notre pays et de celles de nos voisins, voire bien au-delà. Y sont précisées les puissances de charge ainsi que, avec une précision redoutable, l’occupation des points de recharge ou leur indisponibilité (panne…). Aussi complète soit-elle, cette application n’indique toutefois pas les tarifs pratiqués. En effet, la tarification française est d’une complexité sans nom.
C’est simple, sur les bornes de recharge publiques françaises, les tarifs sont extrêmement variables. Et même une fois au pied de la borne, on ne connait pas forcément le prix qui sera facturé, tant les données inscrites sur ces dernières se révèlent généralement vagues. En effet, la facture dépendra du moyen de paiement que vous utiliserez, les bornes dotées, comme une bonne vieille pompe à essence, d’un lecteur de carte bleue étant, en effet, rarissimes. Et, pour un même moyen de paiement, le tarif variera suivant que vous avez souscrit à un abonnement payant, ou non. Prenons l’exemple de l’une des stations de recharge les plus fréquentées de France, la Ionity de Montbartier (82), près de Montauban. Selon la carte de recharge que vous y utiliserez, le prix du kWh y variera de 0 € à 3,20 € ! A ce montant peuvent s’ajouter des frais de connexion allant de 0 € à 55,55 €. Et cela si vous utilisez l’une des bornes délivrant 350 kW. Car si vous préférez la 43 kW, le prix du kWh oscillera entre 0 € et 20,22 € et les frais de connexion entre 0 € et 96 € ! Sachant que, si vous n’utilisez pas de carte mais préférez scanner le QR Code situé sur ces bornes, et donc payer directement votre « plein » à Ionity, le kWh vous coûtera 0,69 € sur les bornes 350 kW et 0,39 € sur celle de 43 kW.
Pour savoir à l’avance combien vous coûtera votre branchement « à la prise », il est indispensable de télécharger l’application, elle aussi gratuite, ChargePrice. Capable de vous indiquer ce que vous paierez en fonction de votre mode de paiement, elle vous permettra d’énormes économies. A condition d’avoir dans votre portefeuille la carte adéquate.
A moins de faire partie des électromobilistes purs et durs, qui emportent systématiquement avec eux plusieurs dizaines de carte de recharge, il vous faudra faire un choix. Sachant que la carte émise par le propriétaire de la borne est en général celle qui permet d’obtenir le meilleur tarif, renseignez-vous sur les opérateurs présents sur vos trajets les plus courants. En parallèle, la plupart des constructeurs automobiles proposent, eux aussi, une carte de recharge qui donne accès à des tarifs négociés avec plusieurs opérateurs. Enfin, une carte très généraliste, tel que le ChargeMap Pass, vous servira de « roue de secours » puisqu’elle donne, le plus souvent, accès à plus de 8 bornes sur 10 en France et en Europe.
Restera à préparer vos trajets comme le faisaient vos parents, ou grands-parents, avant l’invention du GPS. Pas question, en effet, de partir bille en tête en s’arrêtant à la première borne venue lorsque votre batterie sera quasiment à sec. Là encore, ChargeMap vous simplifie la tâche grâce à son planificateur de trajet. En lui indiquant quelle est votre auto et votre trajet, il vous indiquera où vous arrêter afin de minimiser les temps de recharge. Certains véhicules disposent également, dans leur système de navigation, d’une telle possibilité. Mais de l’excellent dispositif présent à bord de la Porsche Taycan à celui, très médiocre, développé par Volkswagen, tous ne se valent pas.
Faut-il recharger sa voiture électrique tous les jours ?
D’un point de vue technique, cela n’a pas de sens, sauf si votre usage vous l’impose. L’idéal est de charger le moins souvent possible au-delà de 80 % et de limiter au maximum les fois où la batterie sera au-dessous des 10 % d’autonomie. En programmant votre auto sur votre borne pour que la recharge ne soit active que durant les heures où l’électricité est la moins chère, il est facile, si vous ne parcourez que quelques dizaines de kilomètres au quotidien, de rester entre ces deux limites.
Pourquoi recharger au maximum à 80 % ?
Cette préconisation tient à la technologie de la quasi-totalité des batteries aujourd’hui utilisées dans les automobiles : le lithium-ion. En effet, au-delà de ce niveau de charge, la batterie s’abime plus vite et perdra plus rapidement de sa capacité totale. Pour les mêmes raisons, il est préférable de limiter, autant que possible, les charges rapides. Cette recommandation est valable pour tous les appareils utilisant de batteries lithium-ion, à commencer par votre smartphone.